Ce bel instrument fait partie, avec quelques autres, des synthétiseurs analogiques qui ont marqués leur époque.
En 1978, alors que le marché de la musique électronique est sensiblement dominé par les américains, particulièrement par Moog et ARP, une autre société américaine, Sequential Circuits, lance son Prophet-5 dans la bagarre. Ce synthé va faire l’effet d’une bombe.
A l’époque, malgré quelques exceptions comme les modulaires Oberheim ou le Polymoog, les synthés sont monophoniques. Arp et Moog se livre une guéguerre amusante sur des détails tels que « molette de pitch-Bend contre ribbon controler » ou « potentiomètres contre curseurs »… rien qui ne fasse véritablement avancer le schmilblick. Dave Smith, le boss de Sequential Circuits Inc va calmer tout le monde avec un clavier conçu pour les musiciens et non pour les ingénieurs ou les commerciaux, polyphonique 5 voix et avec des mémoires. Le succès sera immédiat.
Doté de 2 VCO, 2 enveloppes, 1 LFO, 1 filtre 24db, un mode Unisson permettant d’empiler tout les VCO (2 par voix de polyphonie, ce qui donne 10 VCO, je ne vous raconte pas la tronche du son qui sort !!), le Prophet est donc plutôt classique dans son architecture. Les premières versions permettent de mémoriser 40 sons, les dernières (nous y reviendrons) 120. Une astuce très sympa sur la série des Prophet est que l’on peut sélectionner toutes les formes d’ondes en même temps pour chaque VCO, ce qui augmente encore la puissance du son. Un des parties les plus intéressantes sur ce clavier est la section « poly-Mod » : l’enveloppe du filtre et/ou la fréquence de l’oscillateur B peuvent moduler la fréquence de l’oscillateur A, la largeur de l’onde carrée de l’oscillateur A ou encore la fréquence du filtre, le LFO pouvant également venir s’ajouter à tout cela (et dosable par la molette de modulation), on obtient des possibilités impressionnantes et passer d’une sonorité sage à un effet spécial intergalactique se fait en un glissement de molette … La synthèse FM devient également possible avec cette fonction, 5 ans avant le DX-7 … Une vraie bête je vous dis !!
Il faut préciser également que le Prophet-5 étant contrôlé par micro-processeur (faisant de lui le premier synthé « hybride »), un effet pouvant être désagréable à l’oreille et connu sous le nom d’effet d’escalier est perceptible en cas de mouvements trop brusques sur le filtre pendant le jeu. Dommage pour les Leads nécessitant de subtiles variations …
En 6 années de productions, l’instrument connaitra pas moins de 5 versions différentes : la REV1 (numéro de série 0001 à 0182), REV2 (0183 à 1300), REV3.1 (1301 à 2469), REV3.2 (2470 à inconnu) et enfin REV 3.3 (numéros de série inconnus). Il deviendra plus stable à partir de la REV3.1 grâce au remplacement du chip interne et peut être MIDIfié à partir de la REV 3.2…
Niveau sonore, le Prophet-5 a une aptitude particulière pour les grosses basses synthétiques, les Leads musclés et les nappes. Il est également capable de produire des fx très …radicaux. Il est aussi assez recherché pour ses textures cuivrées et ses drones « Sync » ravageurs d’enceintes.
La descendance du Prophet-5 est toute aussi alléchante : Le Prophet-10 qui est un monstre équivalent à 2 Prophet-5, avec 2 claviers, le genre de truc qui fait la fortune de votre Kiné en cas de réaménagement du home-studio ; Le Pro-one qui est une sorte de tranche monophonique du Prophet-5 mais entièrement analogique cette fois (votre serviteur a eu la chance d’en posséder un et je peux vous dire qu’on a une bonne idée de ce que peut être le Prophet-5 …) ; le Prophet 600 qui est un Prophet-5 « light » mais aussi le premier synthé MIDI de l’histoire.
Jean-Michel Jarre a mis a contribution le Prophet-5 pour les fameux Concerts en Chine, Dominique Perrier s’en servant pour pas mal de Leads, sur Zoolook et plus proche de nous, sur Oxygène 7-13. Pour cet album, il a essentiellement été mis à contribution pour les nappes à caractère cuivré.
Pour conclure, signalons qu’un certain nombre de versions virtuelles de ce fabuleux synthé existent, notamment chez Native Instruments (Pro-5 ; Pro-52 & Pro-53) ainsi que chez Arturia (Prophet V) dont le logiciel propose aussi une émulation du Prophet VS, une version du Prophet sortie dans les années 80, à base de synthèse « vectorielle » mais n’ayant finalement que très peu de point commun avec l’illustre ancêtre mis à part le nom …
Article rédigé par Mr Pitch.
Article lu 1544 fois