Christophe (1973-1977, 2016)

Daniel Bevilacqua, dit Christophe, est né le 13 octobre 1945 à Juvisy-sur-Orge, en banlieue parisienne, d’un père italien entrepreneur en maçonnerie et d’une mère couturière. Peu studieux, l’enfant passe d’un pensionnat à un autre. Ses premières émotions musicales sont Piaf et Bécaud, avant de découvrir le blues et ses idoles Robert Johnson et John Lee Hooker, puis le rock, bien sûr, avec Bill Haley, Little Richard et Elvis Presley. Il se met à l’harmonica et à la guitare puis créé son premier groupe à 16 ans. Après un premier 45T invisible du label du Golf Drouot, il enregistre en 1965 le single Aline qui, dans un raz de marée, se vend à 1 million d’exemplaires ! Quelques autres succès sur 45T s’enchaînent : Les marionnettes (1965), Excusez-moi Monsieur le professeur (1966)… Le chanteur flambe son argent dans l’achat de voitures de sport.

La vague yéyé passée, Christophe compose en 1970 une partie de la bande originale du film La route de Salina, de Georges Lautner, que l’éditeur Francis Dreyfus signe sur son jeune label Disques Motors en faisant le pari d’un retour de flamme pour le chanteur. Après quelques chansons consensuelles, Christophe et Dreyfus décident de produire un album plus ambitieux.

Le producteur propose alors les services d’un jeune talent prometteur qui fait partie de la maison depuis quelques mois : Jean-Michel Jarre. En 1973, les trois hommes construisent dans l’obscurité du studio Ferber un album conceptuel : Les paradis perdus. Jarre, pourtant déjà jeune compositeur, écrit les textes de six des huit chansons de l’album qui remporte un grand succès public et critique. Pari réussi ! Deux 45T en sont extraits : Les paradis perdus et Mickey.

JMJ : “Je crois qu’avec Christophe, à l’époque, on a démarré un truc important : les concepts-albums, le rapport chanteur/producteur, des nouveaux sons, un type de variété-rock qui, jusqu’à une période récente, était resté sans équivalent. On a été des pionniers. J’ai eu beaucoup de plaisir à travailler avec lui.”

Un autre single hors album L’amour, toujours l’amour suit. Puis, très vite, les six mains créent un nouveau projet avec les mêmes recettes que le précédent. JMJ est l’auteur de six nouveaux textes pour l’album Les mots bleus qui enfonce le clou en 1974 : nouveau succès retentissant soutenu par la sortie de deux 45T : Señorita et Les mots bleus, des tubes ! Parmi les musiciens des deux albums figurent le claviériste Dominique Perrier et le batteur Roger Rizzitelli, que Jarre entrainera avec lui en Chine quelques années plus tard.

Christophe, qui a peaufiné son personnage de dandy, va jouer ces deux albums sur scène lors de deux concerts mythiques à l’Olympia les 26 et 27 Novembre 1974, lors desquels dix des chansons jouées sont signées Jarre. Le peintre-musicien-parolier devient aussi metteur en scène à cette occasion : il a notamment l’idée du fameux piano blanc volant que Dominique Webb réalise. Mais déçu par le manque de reconnaissance de son apport sur la carrière du chanteur, Jarre se rapproche bientôt d’un autre compositeur-interprète pour donner libre cours à sa créativité : Patrick Juvet.

La fin des années 70 voit alors Christophe sombrer dans des addictions tout en se donnant dans des albums pointus, plus rock, dont Le beau bizarre de 1978, souvent salué comme un chef d’oeuvre. Jean-Michel Jarre écrira encore, mais plus épisodiquement, quelques textes pour Christophe, dont Daisy et La dolce vita. Ces titres, avec d’autres plus anciens, viendront à la rescousse pour boucler, en 1977, un troisième album commun.

Pendant les années 80, Christophe s’éloigne du show biz’ mais livre encore quelques 45T marquants, dont le fameux Succès fou, puis il rompt avec Dreyfus. Après l’échec de l’album Bevilacqua chez Epic en 1996, il faudra attendre le triomphe de l’Olympia de 2002 pour réhabiliter le chanteur qui compose et tourne de nouveau avec succès depuis. En 2013, il publie un album d’inédits en hommage à Francis Dreyfus disparu 3 ans plus tôt.

“J’étais le premier artiste que Francis a signé quand il a créé les Disques Motors, en 1970. Cet album, Paradis retrouvé, Francis voulait le sortir vite, bien avant qu’il disparaisse, en 2010. Compiler des maquettes à moi de la période Motors, 1970-1988, c’est une idée qui vient de lui. Ces morceaux existaient sous forme de bandes Revox ou de bandes stéréo 24 pistes ou de cassettes. Et moi j’ai pensé que ce serait mon hommage à Francis…”

Depuis 1977, Jarre et Christophe n’ont plus collaboré. Ils se retrouvent cependant sur la même scène du théâtre Marigny en novembre 2010, pour y recevoir une récompense de la Sacem, chacun dans leur domaine. Jarre va aussi saluer Christophe dans sa loge de l’Olympia en janvier 2013. Il se dit alors à demi mots que chacun pourrait participer à un prochain album de l’autre. En septembre 2015, Jean-Michel Jarre annonce finalement que Christophe sera l’une des collaborations figurant sur le volume 2 de son projet Electronica pour le titre Walking the mile.

JMJ : “Nous sommes en train de travailler sur un morceau qui sera sur le second volume de mon album. Je trouve injuste que cet homme ne soit pas perçu comme il le devrait en dehors de la France.” (Le Figaro 22/09/2015)

Parallèlement, Christophe propose à Jarre des maquettes de son nouvel album. JMJ, enthousiaste et inspire, lui propose d’en faire tous les textes. Mais pris par son projet Electronica qui devient un double album au lieu d’un simple, il doit finalement revoir ses ambitions à la baisse et réduire sa participation à un seul texte : Les vestiges du chaos qui donne aussi son titre à l’album qui sort le 8 avril 2016.

“[JMJ] a toujours fait des textes pour moi. C’est quelqu’un qui est très inspirant qui vous dit la façon dont il vous voit. De toute façon il ne fait pas de cadeau, donc c’est quelqu’un qui vous porte vers le haut. Quelque part on s’est retrouvé, on avait plein de choses à se dire et en fait. Ni lui ni moi on n’avait changé de nos amours communs c’est à dire, beaucoup les objets d’art, la peinture, la musique. On en parle mais après on est noyé de parfums, de couleurs, et Jean-Michel c’est quelqu’un qui est comme un cheval fou aussi comme lâché dans un champ de blé rasé.” (“Laissez-vous tenter”, RTL, 05/04/2016).

Christophe s’est éteint dans la nuit du jeudi 16 au vendredi 17 avril 2020. Jean-Michel Jarre lui a rendu hommage.

Site officiel : http://www.christophe-lesite.com/

::Participations aux albums (de Jarre)::

  • 2016 : Electronica 2 : the heart of noise (titre “Walking the mile”)

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::Titres (de Christophe) auxquels Jarre a participé::

  • 1973 : “Emporte-moi”, “Mama”, “Mickey”, “Les paradis perdus”, “Le temps de vivre”, “Ferber endormi” (paroles)
  • 1974 : “L’amour, toujours l’amour”, “La bête”, “Le dernier des Bevilacqua”, “Señorita”, “Les mots bleus”, “La mélodie”, “Le petit gars”, “Drôle de vie” (paroles)
  • 1976 : “Daisy”, “Macadam” (paroles)
  • 1977 : “La dolce vita” (paroles)

::Discographie (de Christophe) sélective::

  • 1973 : “Les paradis perdus” (album), “Les paradis perdus / Mama” (45T), “Mickey / Emporte-moi” (45T)
  • 1974 : “L’amour, toujours l’amour / La bête” (45T), “Les mots bleus” (album), “Señorita / Le temps de vivre” (45T), “Les mots bleus / Le dernier des Bevilacqua” (45T)
  • 1975 : “Olympia” (album live), “Petite fille du soleil / Le petit gars” (45T)
  • 1976 : “Daisy / Macadam” (45T)
  • 1977 : “La dolce vita” (album), “La dolce vita / La mélodie” (45T)

::Vidéos::

Dernière mise à jour le 18.04.2020


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